Jette-toi à l’eau !

La vue de la prison ne m'a jamais laissé indifférent. D'abord par curiosité, puis par inquiétude, et enfin parce que cette vision commençait à s'insinuer dans mes prières.

Je m'appelle Ignasi et chaque fois que je le peux, j'aime prendre mon vélo et explorer les environs de Genève, la ville où j’habite. De temps en temps, lors de mes promenades à vélo, je passais par la prison de Champ-Dollon. Loin de la ville, à moitié cachée et entourée de verdure. Loin pour ne déranger personne, et impeccable à l'extérieur pour ne pas troubler les consciences.

La vue de la prison ne m'a jamais laissé indifférent. D'abord par curiosité, puis par inquiétude, et enfin parce que cette vision a commencé à s'insinuer dans mes prières. "Car j'ai eu faim et vous m'avez donné à manger, j'ai eu soif et vous m'avez donné à boire, j'étais un étranger et vous m'avez hébergé, j'étais nu et vous m'avez vêtu, j'étais malade et vous m'avez visité, j'étais en prison et vous êtes venus me voir". Chaque fois que je passais à Champ-Dollon, la dernière phrase de saint Matthieu me hantait pendant des jours. Soudaine, une voie intérieure m'a dit : "...combien ici ne reçoivent aucune visite...".

Je me représentais cette population de prisonniers, loin de la ville. Et je pensais surtout à ces prisonniers qui ne sont pas seulement loin de la ville, mais aussi loin de leur maison. Ces personnes qui n'ont pas de proches, qui partagent une chambre avec d’autres avec lesquels ils ne peuvent pas communiquer, qui sont loin d'un environnement où ils sont appelés par leur nom et non par leur numéro. Sans liberté, sans nom, sans yeux qui regardent la personne et non le prisonnier. Ils n'ont rien.

Moi aussi, il fait longtemps que j’habite loin de chez moi. Je connais la solitude.Je connais la dureté de rentrer dans son appartement sans que personne ne t'attende.

Je connais la dureté de rentrer dans son appartement sans que personne ne t'attende.

Ce n'est pas la même chose, loin de là, mais c'est suffisant pour comprendre la valeur de la compagnie. "Seigneur, je viendrai te rendre visite".

La quête de l'action était là. Jusqu'au jour où je me suis fixé comme objectif de trouver comment devenir bénévole et faire de ces visites une réalité. Je suis surnuméraire de l'Opus Dei et ma vocation est de faire de petites choses, donc jette-toi à l'eau ! Je me suis informée, je me suis formé et depuis plus de deux ans, je visite un prisonnier tous les quinze jours. Dieu m'a donné la force.

Ce que je fais n'a aucun mérite, car cela ne m'a rien coûté. Dieu m'a offert ce service qui me permet d'être un visage qui écoute sans juger ni poser de questions, d'être la voix qui s'adresse aux anonymes par leur nom et d'être les yeux qui regardent la personne et non le prisonnier. Cela n'a aucun mérite, cela ne me coûte rien. Dieu m'a donné ce don.

Encore une fois, c'est saint Matthieu qui nous rappelle que Jésus nous dit de ne pas juger, quelle chance nous avons ! La visite de prison est un bénévolat qui se limite à regarder et écouter quelqu'un comme on regarde un ami. Donner à une personne le droit d'être une personne et non un prisonnier. D'avoir un nom, pas un numéro. Ce n'est pas toujours facile, mais rien de ce qui vaut la peine n'est facile.

Lorsque je m'arrête pour réfléchir à la durée de mon volontariat, je pense à l'importance de la prière.

Si tu ne pries pas, il ne se passe rien, mais si tu pries, il se passe beaucoup de choses.

C'est sans doute la semence profonde que la lecture et la méditation de l'Évangile ont laissée en moi qui m'a fait trouver cette manière d'être "utile" dans mes circonstances. Si tu ne pries pas, il ne se passe rien, mais si tu pries, il se passe beaucoup de choses.