« J’essaye de vivre mon travail en tant que vocation »

Directeur des risques dans un groupe industriel du CAC 40 et père de 11 enfants, Laurent explique son parcours et sa conception du travail. Entretien.

Votre parcours professionnel semble en lien avec votre cheminement spirituel et votre conversion. Racontez-nous…

Dieu ne m'a pas fait évoluer par hasard dans ma carrière… Je suis convaincu qu'il m’a dirigé en attendant qu'une chose : ma conversion.

Dieu agit ainsi pour tout le monde mais je ne sais pas pourquoi je sens qu’Il a aussi mis dans mon cœur l'envie de Lui dire oui à un moment donné. Ce qui me fait dire cela c'est aussi l'enchainement des événements : j’ai rejoint par hasard le monde des risques et des assurances et j’ai rencontré ma femme dans ce contexte professionnel.

Au début de ma vie professionnelle, je ne priais pas beaucoup mais je me souviens avoir prié pour que je me marie et ai des enfants. J’ai rencontré ma femme à 27 ans et je me suis marié à 30 ans. Ma femme a alors prié pour ma conversion pendant 10 ans. Je me suis converti vers 38/40 ans et je suis devenu fidèle de l'Opus Dei à 40 ans.

Je crois que Dieu frappe à la porte de chacun, qu'il se tient prêt pour autant que l'on veuille bien collaborer avec lui.

«Dieu se tient prêt pour autant que l’on veuille bien collaborer avec lui»

Qu’est-ce qui dans votre travail soutient votre foi ?

Au début, je pensais que le monde du travail était plutôt opposé à une vie de foi, d'élévation. Les luttes de pouvoir, d'intérêts, l'hypocrisie, le show off me semblaient plus présent que l'abnégation, la discrétion, la sincérité.

En fait, avec mon chemin de conversion vers 38 ans, j'ai commencé à comprendre que le monde du travail n'est pas opposé à une vie de foi, mais au contraire, l'occasion pour la vivre. C'est là où Dieu m'attend.

Qu’est-ce qui dans le travail s’oppose à votre foi ?

Oserais-je dire qu'aujourd'hui, je crois que rien dans mon travail n’est contraire à ma foi. J'essaye de vivre mon travail en tant que vocation. Je suis laïc dans le monde et ma vocation est de me sanctifier dans mon travail.

Votre épouse travaille-t-elle ?

Oui, plus que moi : nous avons une famille nombreuse. Donc ma femme est cuisinière, conducteur de transport scolaire, lessiveuse, infirmière, coach, etc.

Avez-vous déjà été confronté au risque que le travail empiète sur votre vie de famille ?

Oui, lorsque j'ai été en phase de doutes, de difficultés. Mais honnêtement, j'essaye en dehors de circonstances externes exceptionnelles, de voir mes grands enfants le soir, de m'occuper de tous le matin, de ne pas avoir d'activités sans la famille le week-end, et de limiter les voyages. Pour cela des petites résolutions : par exemple, en cas de voyages professionnels long courriers, ne pas céder à la tentation de rester sur place tout ou partie du week-end. Si un enfant en a besoin, prendre un temps même court en tête à tête, etc.

«Rien dans mon travail n’est contraire à ma foi»

Le travail peut-il devenir une idole ? à partir de quand ?

Oui s'il devient exclusivement une fin en soi au service de sa propre image. C'est une tentation pour tous.  Pour les croyants, le "correcteur" c'est d'ordonner Dieu, la famille puis le travail.

Est-ce que vous priez pendant votre travail ?

Oui il y a une relation à Dieu que j'essaye d'entretenir dans mon travail en lui offrant mon travail, en essayant de vivre la charité et la vérité, de me poser la question quand je n'ai pas envie de faire quelque chose : « Qu'est ce que Dieu attend de moi ? »

Et puis un point clé est la fréquentation régulière des sacrements pour offrir pendant la messe mon travail, celui des autres, prier pour ceux qui ne croient pas, etc. Et la confession.....

Globalement je cherche à ne pas scinder ma vie spirituelle et ma vie professionnelle. Une telle séparation ne serait pas compatible avec l'Evangile. Au contraire, je cherche à unifier ma vie en conservant ma relation à Dieu pendant le travail. Je ne dis pas que j'y arrive tout le temps mais j'essaye....